La protection du paysage, une question de bord politique? Interview avec Kurt Fluri, conseiller national PLR

11.04.22

Pour Kurt Fluri, Conseiller national PLR et membre du comité d’initiative de l’Initiative paysage, «la protection du paysage et de la nature sont aussi des objectifs pour les libéraux, puisqu’il s’agit d’objectifs durables». Lorsqu’il était syndic de Soleure, Kurt Fluri a également servi cette cause. L’engagement local et régional ne suffit cependant pas pour faire appliquer le principe de la séparation entre les parties constructibles et non constructibles du territoire, raison pour laquelle il s’est engagé dans l’Initiative paysage et pour un article constitutionnel.

Foto Adrian Schmid

Kurt Fluri, conseiller national PLR, membre du comité d’initiative de l’Initiative pour le paysage

Monsieur Fluri, pourquoi avez-vous choisi cet endroit d’où l’on a une vue sur la montagne du Weissenstein pour cette interview?

Kurt Fluri: Le Weissenstein n’est pas seulement «la» montagne des Soleuroises et des Soleurois, c’est aussi mon endroit préféré dans le Jura. J’ai chaque fois un immense plaisir à être dans ce lieu si particulier de l’Arc jurassien, avec son vaste pâturage du «Göiferlätsch», et l’Hôtel Kurhaus, Le télécabine et surtout la vue époustouflante, puisque par temps clair, on peut voir du Mont-Blanc au Säntis. J’associe à cet endroit d’innombrables souvenirs. J’y monte le plus volontiers à pied par le magnifique sentier du «Stiegenlos».

Vous étiez jusqu’en octobre 2021 syndic de la ville de Soleure. Comment le paysage de votre région a-t-il changé? 

Les territoires urbanisés ont bien sûr aussi augmenté dans la ville de Soleure et sa région. Les nombreuses forêts garantissent cependant que des vastes zones ne seront pas bâties et resteront non constructibles. Par chance, le Jura se trouve lui-même dans une zone de protection décidée en 1942 déjà par le Conseil d’État soleurois, qui a fait à cet égard œuvre de pionnier et fait preuve d’une grande capacité d’anticipation. Cette zone a été encore élargie en 1962. Grâce à elle, les bâtiments et les installations ne sont en principe pas autorisés dans cette région. Dans les faits, il s’agit là d’une mise en œuvre rigoureuse de la séparation entre les parties constructibles et non constructibles du territoire, ce que vise au fond aussi notre initiative. Les éoliennes prévues dans le plan directeur constituent – malheureusement – une exception.

Pourquoi la séparation entre les parties constructibles et non constructibles du territoire est-elle aussi cruciale ?

Le mitage est également synonyme d’imperméabilisation du sol et nuit fortement à la faune et à la flore. Pour se maintenir, la biodiversité a besoin de surfaces qui varient d’une espèce à l’autre. Si ces surfaces manquent, les paysages se désertifient, même s’ils restent peu utilisés. En outre, protéger le sol, c’est aussi protéger le climat. Des écosystèmes intacts, des sols en bonne santé et une grande diversité des espèces sont aussi importants que la réduction des gaz à effet de serre. Enfin, la séparation rigoureuse des zones constructibles et non constructibles est une exigence majeure en matière d’aménagement du territoire. Personnellement, et je crois que je ne suis pas le seul, j’apprécie beaucoup lorsqu’un vaste espace est seulement limité par la forêt ou la montagne. Or en Suisse, en tous les cas sur le Plateau, il n’est presque plus possible de jouir de tels paysages.

Pourquoi l’Initiative paysage est-elle importante?

Aujourd’hui, le principe de la séparation entre les parties constructibles et non constructibles du territoire n’est pas appliqué. La disposition de la loi sur l’aménagement du territoire est claire en soi, mais elle a été progressivement affaiblie par le Parlement et par la pratique des cantons, ce qui fait qu’aujourd’hui, près de 40% de toutes les surfaces bâties en Suisse se trouvent à l’extérieur des zones à bâtir! Du point de vue des principes de l’État de droit, cette situation est insoutenable et doit absolument être corrigée.

Pourquoi faut-il agir au niveau fédéral pour la protection du paysage, comme le veut l’Initiative paysage, et pas uniquement aux niveaux cantonal, régional voire communal?

Alors que le droit fédéral est très clairement formulé, un grand nombre d’exceptions au principe de la séparation sont admises. Face à cette situation, une initiative constitutionnelle au niveau fédéral est le seul moyen d’agir.

Vous êtes membre des Libéraux-Radicaux. La protection du paysage est-elle une question de bord politique?

La protection du paysage et de la nature sont à vrai dire aussi des objectifs pour les libéraux, puisqu’il s’agit d’objectifs durables. Or ces objectifs sont souvent opposés à des objectifs économiques à court terme et les besoins liés à l’économie l’emportent malheureusement souvent sur les besoins de conservation et de protection, qui s’inscrivent dans une perspective à long terme. Je le regrette vivement, car cela risque de disperser les personnes qui partagent les mêmes idées. Il faut par exemple réussir à utiliser davantage l’énergie hydraulique là où des interventions portant atteinte au paysage ont déjà été effectuées. La construction d’éoliennes sur des sites exposés, comme sur la première chaîne du Jura, est à proscrire, compte tenu de la faible et irrégulière récolte d’énergie. Cela permet de tenir compte de la valeur inestimable de paysages impressionnants, voire uniques.

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